Publié le 2021-05-27 | lenouvelliste.com
Le référendum du pouvoir PHTK n’a pas d’alliés, sinon que des personnalités et partis politiques proches du pouvoir qui le défendent. Jusqu’ici, à moins d’un mois de la tenue du référendum visant à doter le pays d’une nouvelle constitution, il n’y a pas de débats contradictoires sur le texte qui va être soumis au vote. Dans certaines villes de province, les débats annoncés n’ont pas pu avoir lieu. Dans d’autres, des causeries à huis clos entre copains se sont déroulées. À Pétion-Ville, un forum de trois jours a été organisé en début de semaine sur le processus, mais uniquement pour les partis politiques proches du pouvoir. Les déclarations dans les médias et dans d’autres espaces publics prouvent qu’il n’y a pas de consensus sur le processus comme il n’y en a pas eu sur le Conseil électoral provisoire chargé de l’organiser. Il n’est pas de trop de rappeler que le référendum est inconstitutionnel au regard de la Constitution de 1987 amendée. Et le CEP qui a été créé avec des proches du pouvoir n’a toujours pas prêté serment devant la Cour de cassation.
Comme si cela ne suffisait pas, de plus en plus de voix se sont élevées dans la communauté internationale contre le référendum. Les États-Unis d’Amérique ne ratent pas une occasion de s’en démarquer. Le Parlement européen, la semaine écoulée, s’est désolidarisé du processus, jugé non transparent. Haïti est un pays souverain. Sur le papier, il n’a pas besoin d’autorisation de la communauté internationale pour changer sa Constitution. Or nous savons que notre pays dépend de l’aide internationale. Rappelons que les Etats-Unis et l’Union européenne sont les deux principaux bailleurs de fonds d’Haïti. L’administration de Jovenel Moïse peut-elle ignorer leurs positions sur le processus ?
Jusqu’ici, les bienfaiteurs d’Haïti prennent leurs distances vis-à-vis du référendum, mais ils ne préfèrent aucune menace, aucune injonction. Une telle idée ne devrait pas être évoquée dans les relations entre des pays indépendants, mais on connaît l’adage qui veut que »qui finance commande ». L’histoire récente haïtienne regorge de faits qui le prouvent. On ne sait pas si la communauté internationale va se contenter d’exprimer sa position et laisser les autorités haïtiennes décider. On ne sait pas non plus si la communauté internationale souffle le chaud et le froid. On ne sait non plus si le président Jovenel Moïse est disposé à organiser son référendum quel que soit le prix.
Il n’y a pas de doute que le référendum va coûter cher au pays. Il risque notamment de diviser davantage la classe politique, voire polariser encore plus la société haïtienne. Les appels au boycott du processus se multiplient. D’aucuns n’écartent la possibilité de recourir à la violence pour défendre la loi mère. Les appels à la violence se font ouvertement et sans langue de bois. Faut-il croire à la promesse des autorités haïtiennes de garantir la sécurité des citoyens le jour du vote ? On se rappelle les multiples tweets du président Jovenel Moïse annonçant des mesures drastiques contre l’insécurité. On connaît la suite.
Outre le profond désaccord au sein de la société sur le référendum, il y a la menace du coronavirus. Il semble que cette menace est prise très au sérieux. Lors d’une conférence de presse mardi dernier, le porte-parole du Conseil électoral provisoire, Hubert Jean, a admis que le coronavirus peut hypothéquer la tenue du référendum le 27 juin prochain. De quoi porter le CEP et des officiels du gouvernement à multiplier les déclarations pour tenter de dissiper toute crainte sur la tenue du référendum. Ce qui n’empêche pas toute personne lucide d’en douter. Que le référendum se tienne ou non, il va coûter cher au pays. C’est la seule chose qui soit sûre pour l’instant.